Pour bien comprendre ce qu’est un éditeur, il faut déjà bien avoir en tête les deux types de droits qui existent dans la musique: les droits Master et les droits Publishing.
Concrètement, quand vous écoutez une musique, vous écoutez toujours simultanément deux choses: l’enregistrement, c’est-à-dire les gens qui ont enregistré, chanté, etc. cette chaîne là, ce sont des artistes et cette partie comprend donc l’enregistrement, le recording, le studio… et vous écoutez aussi simultanément une création, une composition et une écriture, des gens qui ont écrit et composé une oeuvre musicale (la partition); on écoute donc toujours simultanément un enregistrement et une oeuvre; ces deux parties sont totalement séparées juridiquement, ce ne sont pas les mêmes intervenants ni les mêmes interlocuteurs.
D’un côté, il y a la chaîne de l’artiste, celui qui chante; quand on parle d’artiste, on parle d’interprète, celui qui va enregistrer en studio; et le partenaire de l’artiste, dans la filière musicale, c’est le producteur.
La définition du producteur, dans le code de la propriété intellectuelle, c’est très simple, c’est celui qui a l’initiative et qui finance un enregistrement (le financement de toute la phase d’enregistrement); cela signifie aller en studio, payer un cachet à l’artiste, payer un cachet aux musiciens, louer le studio puis financer le mixage, le mastering et tout ce qui s’ensuit: c’est la chaîne artiste/producteur.
De l’autre côté, il y a l’auteur-compositeur, celui qui va donc écrire et composer; ça peut être uniquement un compositeur (notamment en musique électronique); c’est lui qui va composer la mélodie, écrire les paroles; mais, à son niveau, il n’y a pas d’enregistrement, on parle vraiment uniquement de la partition de l’oeuvre, pas de sa fixation sur un support quelconque.
Bien entendu, tout cela est extrêmement dilué et imbriqué car bien souvent auteur-compositeur et artiste-interprète forment une seule et même personne, cette même personne qui concentre donc plusieurs qualités.
Mais malgré cette situation, ces deux qualités resteront toujours totalement distinctes, même si c’est une seule et même personne; avec des caisses différentes, des organismes différents, des rémunérations qui n’ont absolument rien à voir les unes avec les autres.
Concrètement, pour l’enregistrement et le côté producteur, les rémunérations vont avoir lieu avec les ventes de l’enregistrement donc sur CD, vinyle, streaming (essentiellement aujourd’hui).
Par exemple, lorsque vous achetez un disque à la FNAC, que vous faites un téléchargement sur iTunes ou que vous écoutez un titre sur Spotify, l’argent va transiter de vous (consommateur, “acheteur de disque”) au magasin (Fnac si c’est du physique, iTunes et Spotify c’est du digital) puis au distributeur, au producteur et enfin à l’artiste.
L’argent suit toujours cette chaîne là et, dans ce circuit là, l’auteur-compositeur ne touche pas d’argent.
L’auteur-compositeur dont le partenaire est l’éditeur va toucher de l’argent essentiellement par le biais de la gestion collective.
>>> Quelques précisions utiles de Marc-Olivier Deblanc – Avocat spécialisé en « droit de la création <<<
Le domaine de l’édition musicale couvre les droits d’auteur issus en France de la Loi du 11 mars 1957 (visés aux articles L.111-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle et plus particulièrement les article L.132-1 et suivants, s’agissant des contrats de cession et d’édition d’oeuvres musicales et, par extension, les pactes de préférence éditoriale).
L’on utilise couramment le terme « Publishing » qui est l’équivalent en anglais (to publish = éditer / Publisher = Editeur).
Les droits voisins (issus de la « Loi Lang » du 3 juillet 1985) concernent les droits des producteurs de phonogrammes (L.213-1 du CPI) et ceux des Artistes Interprètes (L.212-1 et suivants du CPI).
Le terme « Masters » désigne les « Bandes Masters » ou « Bandes Mères » c’est-à-dire les enregistrements originaux et renvoie donc aux droits des Producteurs de Phonogrammes qui sont propriétaires desdites Bandes et titulaires des droits d’exploitation qui y sont attachés (notamment parce qu’ils les ont financés). On dit du Producteur qu’il est le « Master Owner » (le propriétaire des enregistrements).
Dans la pratique on utilise couramment ces deux termes (Publishing/Masters), notamment pour les demandes de synchronisation (au sein d’une publicité ou d’un film notamment) ou de samples.
Il faut une autorisation par « type » de droits (droit d’auteur pour l’utilisation de l’oeuvre : on interroge alors l’éditeur, les ayants droit/ droits voisins pour l’utilisation de l’enregistrement original).
La pratique contractuelle est celle de la clause « MFM » qui implique que les sommes versées à l’Editeur au titre de l’utilisation de l’oeuvre elle-même soient équivalentes à celles versées au label pour l’utilisation des Masters.